Vous pensiez bien faire en choisissant une compote « sans sucres ajoutés », un dessert « 100 % fruits » ou une purée « bio » ? Pourtant, un ingrédient revient systématiquement, même dans les recettes les plus vertueuses : l’acide ascorbique, aussi appelé vitamine C ou E300. Une étude de l’ANSES (Etude transversale Oqali : Evolution des fréquences de présence d’additifs sélectionnés sur des critères de priorité d’évaluation au sein des produits transformés disponibles sur le marché français) a révélé qu’entre 2008 et 2019, son usage dans les compotes avait bondi de 10 points. Résultat : près de 80 % des compotes et desserts fruités en contiennent aujourd’hui. Pourquoi une telle omniprésence ? Est-ce vraiment indispensable ? Et pourquoi cet additif est-il problématique à nos yeux ?
Poudre d’acide ascorbique
Qu’est-ce que l’acide ascorbique ?
L’acide ascorbique est la forme chimique de la vitamine C. On la trouve naturellement dans de nombreux fruits et légumes. Mais celle que l’on retrouve dans les produits transformés est fabriquée industriellement à partir de glucose, souvent issu de maïs ou de manioc. Elle est utilisée comme additif alimentaire, sous le nom de E300, pour ses propriétés antioxydantes.
Pourquoi est-elle utilisée massivement dans les compotes et purées de fruits ?
- Pour prévenir le brunissement
L’acide ascorbique évite que les fruits s’oxydent au contact de l’air. Elle agit donc comme un antioxydant, empêchant le brunissement des purées de pommes ou de poires, surtout après une cuisson à haute température ou un stockage prolongé.
- Pour prolonger la durée de conservation
Elle permet de stabiliser les produits, sans recourir à des conservateurs controversés comme les benzoates. Ou de recourir au sucre (la teneur en sucre des compotes s’est considérablement allégée depuis quelques années d’ailleurs). C’est une solution économique pour garantir une longue durée de vie en rayon, tout en conservant l’aspect appétissant du produit.
- Pour bénéficier d’allégations nutritionnelles
En ajoutant de l’acide ascorbique, les fabricants peuvent afficher sur l’emballage : « source de vitamine C« , même si cette vitamine a été ajoutée après que les traitements thermiques aient détruit celle naturellement présente dans les fruits.
- Parce que c’est un ajout devenu réflexe pour de nombreux industriels
Dans l’agroalimentaire, l’acide ascorbique est souvent ajoutée systématiquement, même si le produit n’en a pas techniquement besoin. Cela garantit une stabilité visuelle et gustative, quelle que soit la qualité des matières premières.
Pourquoi cette omniprésence est-elle problématique ?
- Elle masque la réalité du produit
Un aliment qui a besoin de vitamine C pour rester « joli » est souvent un produit ultra-transformé. Fruits trop mûrs, stockage prolongé, cuisson à haute température : l’acide ascorbique vient souvent camoufler une détérioration de la qualité initiale. D’ailleurs, la classification NOVA considère les produits contenant E300 comme ultra-transformés (NOVA 4).
- Elle entretient une illusion de naturalité
Même les produits bio ou estampillés « 100 % fruits » peuvent contenir de l’acide ascorbique. Elle est autorisée dans le cahier des charges de l’agriculture biologique, ce qui permet à des produits très transformés de paraître sains et artisanaux. C’est une astuce du marketing clean label : un ingrédient chimique toléré car perçu comme « naturel ».
- Une production peu transparente
Près de 40 % de l’acide ascorbique mondiale est produite en Chine, souvent à partir de cultures intensives (et parfois OGM). Sa fabrication repose sur des procédés industriels lourds, peu documentés et souvent opaques. Et l’impact environnemental de cet ingrédient reste largement ignoré.
Et pour la santé ?
L’acide ascorbique est sans danger aux doses présentes dans l’alimentation courante. Elle est même bénéfique en tant que vitamine. Les effets indésirables (troubles digestifs, calculs rénaux) n’apparaissent que pour des doses très élevées, supérieures à 1000-2000 mg par jour, ce qui n’est pas atteignable par les compotes seules.
Mais ce n’est pas tant l’acide ascorbique elle-même qui pose problème… que la transformation qu’elle rend possible. Elle permet aux industriels de proposer des produits très transformés sous une apparence naturelle.
Comment l’éviter ?
- Lire les étiquettes : l’acide ascorbique est toujours mentionnée (même si elle peut apparaître sous plusieurs noms à l’instar de E300, vitamine C ou encore antioxydant) ;
- Vérifier la composition de vos produits : en vous aidant d’application comme Open Food Facts ;
- Privilégier les compotes artisanales ou faites maison : on trouve quand même quelques compotes et purées de fruits ne contenant aucun acide ascorbique dans les rayons. Vous pouvez également acheter nos « Toupins » les yeux fermés, nous n’y mettrons jamais d’acide ascorbique.
Conclusion
L’acide ascorbique n’est pas un ennemi en soi. Mais sa présence quasi-systématique dans les compotes révèle une réalité plus dérangeante : celle d’une industrie qui transforme les aliments en profondeur, tout en entretenant une illusion de naturalité. Ce n’est pas tant l’additif qu’il faut remettre en cause… que ce qu’il permet de dissimuler.
Danielle Valdenaire
Restez informé
de nos actus !
Si vous souhaitez en savoir plus sur nos aventures pour promouvoir le mieux manger…